Comment isoler « thermo-acoustiquement » ses planchers, ses murs, sa toiture, ses menuiseries et plus encore ?
Le tout avec des isolants écologiques et des solutions actuelles ?
Dans cette fiche de lecture, je traiterai du livre « l’isolation thermique-acoustique » de Jean-Louis Beaumier et Franck Janin, sorti aux éditions Terre Vivante en novembre 2017.
Et aussi étrange que cela puisse paraître, on n’y parlera pas (ou peu) d’isolation thermique ou d’isolation acoustique.
Il sera seulement sujet de matériaux et de méthodes d’isolation thermique-acoustique.
La subtilité est fine mais cela change tout.
Qui plus est, on y abordera que les matériaux naturels.
Autrement, je ne prendrai pas la peine d’avoir un blog sur l’éco-construction… Évidemment !
Il était souvent compliqué de choisir un isolant travaillant pour un confort intérieur global, mais ça… c’était avant !
L’isolation thermique-acoutisque :
Solutions combinées écologiques – En neuf et en rénovation
Le temps des synergies
Aujourd’hui, les professionnels de la construction se réfèrent à des réglementations parfois contraignantes mais souvent nécessaires.
Je pense en particulier à la réglementation thermique (RT 2012, RT 2020).
La nouvelle réglementation acoustique (NRA 2000) n’étant selon les dires des auteurs absolument pas à jour (et ne l’ayant apparemment jamais été).
L’objectif de ces réglementations est une mise en application concrète et généralisée des études développées ces dernières années en matière de confort intérieur et de consommation énergétique.
Elles se sont donc imposées pour relayer les résultats apportés par des outils de calcul des propriétés des matériaux de plus en plus pointus.
C’est un passage un peu forcé de la théorie à la pratique en somme.
Le tout, sur une gamme de matériaux de plus en plus étendue et intégrant tant bien que mal les « nouveaux » matériaux bio-sourcés.
Comme quoi, l’innovation est souvent derrière nous :)
Mais actuellement, l’évolution naturelle de ce développement nous amène à ne plus penser en terme de performances isolées (même quand on parle d’isolation :o).
Cela signifie ne plus avoir, par exemple, les thermiciens d’un côté, les acousticiens de l’autre. Sans interaction, sans collaboration.
Les prochains grands chapitres à écrire dans l’art du confort moderne seront certainement ceux des performances combinées dont ce livre est un parfait exemple.
Il associe des solutions d’isolations thermiques, acoustiques et écologiques travaillant pour le confort des occupants mais aussi pour leur santé.
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Terre-Paille | La Solution des Auto-Constructeurs Ingénieux
Le confort moderne
A l’heure actuelle, nos contemporains visent les conforts… Tous les conforts !
Confort thermique, confort acoustique, confort budgétaire et j’en passe.
Mais voilà, certains investissements se justifient mieux que d’autres.
L’avantage de l’isolation thermique est qu’il est facile de mesurer les gains qu’elle engendre.
Je pense notamment aux économies de chauffage qui, calculées sur quelques années rendent les travaux thermiques parfaitement rentables.
Pour l’isolation acoustique c’est plus compliqué.
En effet, une mauvaise isolation phonique ne nous coûte pas plus cher sur le long terme.
Pourtant, elle peut dégrader considérablement notre qualité de vie.
C’est d’ailleurs cette absence de retour sur investissement pécuniaire qui explique qu’il n’existe pratiquement aucune aide financière pour inciter à une meilleure isolation phonique.
C’est également le fait que chacun d’entre nous ayant notre propre sensibilité sur ce terrain, il est malaisé d’établir des barèmes clairs. Applicables à tous.
Que trouve-t-on dans ce livre ?
Comme je l’ai dit plus haut, ce livre n’a pas vocation à traiter l’isolation thermique ou l’isolation acoustique isolément.
Il n’a pas pour but de délivrer des méthodes pour pallier le manque d’isolation phonique d’une bonne isolation thermique.
Pour les personnes intéressées à rentrer en profondeur dans un de ces deux sujets, il existe déjà deux ouvrages brillants chez le même éditeur.
L’isolation phonique écologique
de Jean-Louis Beaumier
L’isolation thermique écologique : Conception, matériaux, mise en oeuvre
de Jean-Pierre Oliva et Samuel Courgey
Cela implique que les solutions abordées dans « l’isolation thermique-acoustique » sont orientées vers la synergie de ces deux qualités.
Ce qui n’est pas chose facile, nous le verrons dans la suite de l’article.
Il n’y aura dans ces pages :
- Pas de reprise d’informations existantes dans un des deux livres cités ci-dessus.
- Pas de techniques de mise en œuvre pas à pas.
- Pas de solutions de laboratoires inapplicables sur le chantier.
- Pas de solutions d’antan inadaptées aux recommandations actuelles.
Par contre, tu seras ravi-e de découvrir :
- Un rappel assez complet des fondamentaux de la thermique et de l’acoustique.
- Uniquement des solutions en éco-matériaux possédant un avis technique ou DTU.
- Des solutions en filière sèche (ossature bois).
- Des solutions en filière humide (maçonné).
- Une considération des transferts de vapeur d’eau pour limiter les risques de moisissure, de dégradation des matériaux ou de baise des propriétés thermiques.
- Un classement thermique et acoustique de chaque solution. Par ordre de performance et non par unité de mesure (parfois ésotériques).
- Une distinction des qualités d’isolation et d’inertie dans le thermique.
- Une distinction des qualités de bruits aériens et des bruits d’impact dans le phonique.
- Une description minutieuse des complexes mis en avant.
- Une indication de la masse volumique de (presque) chaque élément des complexes traités.
- Une indication sur la difficulté de mise en œuvre de ces complexes.
- Une indication sur la classe de prix de chaque solution.
Le tout avec 80 exemples de solutions constructives thermique-acoustique, dont :
- 22 murs.
- 10 cloisons.
- 15 sols ou planchers bas (sur garage ou sous-sol).
- 10 planchers d’étages.
- 8 toitures dont 1 végétalisée qui cartonne en acoustique :o)
- 8 fenêtres et portes.
- 10 liaisons entre éléments constructifs
>>> Article connexe: Peintures et Enduits Bio [Fiche de lecture] <<<
Acoustique et thermique : deux caractères contradictoires
L’enjeu de ce livre est de taille car combiner acoustique et thermique n’est pas une mince affaire.
Voici quelques exemples des difficultés à contourner :
L’effet de masse
Ce qui est bon pour l’isolation acoustique se sont les matériaux à masse moyenne voire forte (35-55kg/m³ et plus) car ils réduisent la propagation de fréquences graves.
L’isolation thermique, quant à elle, valorise la porosité et les densités moindres (15-30kg/m3).
Par exemple, un panneau de liège sera une excellente solution thermique et acoustique sur un plancher lourd (dalle) mais restera très insuffisant phoniquement sur un plancher léger (solive-osb).
Compacité et modularité
De la même manière les bons réflexes en thermique, que sont les habitats compacts et les espaces ouverts, effraient les acousticiens.
Ces derniers opteraient plutôt pour des habitats modulaires qui diminueraient tout risque de propagation des ondes sonores.
Le calcul de performance
S’il est facile de mesurer le R d’un mur en additionnant les différentes couches qui le composent, il n’en va pas de même pour la résistance phonique.
Celle-ci doit être modélisée par informatique avec des logiciels complexes.
Ajoutons à cela qu’un manque partiel d’isolant dans un mur en ossature (dû à une négligence) aura des répercutions difficilement appréciables au niveau thermique alors qu’il créera un pont phonique extrêmement important au niveau acoustique.
Les lames d’air
Au niveau acoustique, une lame d’air entre l’isolant et le mur est bienvenue alors qu’en thermique cette lame d’air pourrait devenir la source d’une accumulation d’humidité malvenue.
Pour l’isolation thermique, on favorisera une continuité entre l’isolant et le mur.
Le vitrage
La RT 2012 impose qu’un tiers de la surface murale de nos maisons soit vitrée pour nous permettre de profiter des apports solaires passifs.
Seulement ces vitrages très performants en matière d’isolation thermique sont beaucoup moins performants sur le plan phonique.
Pour amoindrir cette insuffisance, une mise en place irréprochable de ces menuiseries doit être opérée.
Il n’y a donc pas de matériau miracle et toute la difficulté est d’aligner les deux variables complexes du thermique et du phonique.
Heureusement, donc, qu’il existe ce livre car comme je viens de le démontrer, les décibels et les calories ne s’entendent pas, elles sont même plutôt en froid :o)
Ce que j’ai appris :
Il existe l’isolation et l’isolement.
L’isolation étant l’acte d’isoler, la pratique constructive et l’isolement c’est le résultat mesurable ou comparable obtenu.
Des techniques de pro accessibles à tous
Bref, on l’aura compris, si le diagnostic est aisé, le remède est difficile.
D’autant que je n’ai pas abordé les antagonismes propres à chaque caractéristique.
Les bruits aériens et les bruits d’impacts doivent être traités selon une approche différente.
Idem pour l’isolation thermique et l’inertie thermique qui concourent tous deux à la qualité de l’ambiance thermique.
Néanmoins, « l’isolation thermique-acoustique » nous aide grandement à nous dépêtrer de ces imbroglios.
On remarquera pour se rassurer que la ouate de cellulose, la laine de bois et la botte de paille tirent leurs épingles du jeu en offrant des qualités combinées assez honorables. Il faudra toutefois prendre conscience du contexte climatique et hygrométrique ainsi que du type d’élément à isoler (cloison, mur, plancher).
Cependant, le point incontournable reste la rigueur dans la mise en œuvre de toute solution isolante.
Car aussi favorables soient-ils, les cas d’études ne survivent à aucune négligence humaine.
Sur ce point, la série concernant les 10 cas de jonctions entre les éléments constructifs est très riche en informations techniques. C’est sûrement le chapitre le plus brûlant du livre.
Mon avis sur « l’isolation thermique-acoustique »
Cet ouvrage est une mine de réponses à une question non abordée dans les autres approches plus classiques du sujet de l’isolation.
Il offre, premièrement, les fondamentaux indispensables à la compréhension de ces deux formes d’isolation.
Puis, il développe la boîte à outils mentale nécessaire à la synergie de ces dernières.
En ce sens c’est un opus qui a obligatoirement sa place dans la bibliothèque de l’artisan ou de l’auto-constructeur.
Le fait de sa sortie récente (il y a moins d’un an) en fait un livre bien à jour des dernières actualisations et cela se ressent tout au long de la lecture.
Les fiches techniques claires et complètes fournissent des perles de connaissances accessibles au plus grand nombre.
Chacune d’entre elles complète les précédentes et même quand un matériau est traité plusieurs fois, c’est toujours sous un jour et avec des éclairages particuliers.
Au final, même les fiches techniques se lisent comme une histoire où l’on découvre les protagonistes au fil des pages.
Les auteurs y proposent :
- des variantes de performances possibles (en ajoutant ici ou en enlevant là).
- des variantes de matériaux utilisables (en remplaçant celui-ci par celui-là).
- des observations générales
- des observation sur la mise en œuvre
Ces variantes permettent d’intégrer les bons réflexes pour bénéficier des avantages de chaque solution.
Que ce soit pour un complexe de mur de plancher, de jonction, etc. …
Au final, la seule critique négative que je trouve à faire est sur la mise en page de ces fiches techniques.
Celles-ci pourraient être affichées sur la même double-page plutôt que de se chevaucher.
Mais à part ce détail ce livre est de grande qualité.
Les auteurs
Jean-Louis Baumier : ingénieur, conseillé en acoustique de l’éco-construction travaillant depuis plus de quinze ans sur les éco-matériaux.
Franck Janin : ingénieur physicien travaillant depuis plus de dix ans sur la thermique du bâtiment en privilégiant les techniques passives et les éco-matériaux.
Si tu as lu ce livre et que tu as un avis dessus, laisse-nous un mot dans les commentaires.
Pour les autres, il est disponible ici ;)
Au plaisir !